PERSONA GRATA, un projet qui interroge la notion d’hospitalité à travers le prisme de la création contemporaine
Un projet collectif du Musée national de l’histoire de l’immigration et du MAC VAL
16 octobre 2018 – 20 janvier 2019
Deux institutions – le Musée national de l’histoire de l’immigration et le MAC VAL – Musée d’art contemporain du Val-de-Marne – proposent ensemble Persona grata, une exposition en deux lieux dans laquelle les artistes interrogent la notion d’hospitalité à travers le prisme de la création contemporaine et abordent toutes les dimensions de ce qui construit ou bouscule les notions d’accueil et d’altérité.
Alexia Fabre, conservatrice en chef du MAC VAL et Hélène Orain, directrice générale du Palais de la Porte Dorée – Musée national de l’histoire de l’immigration ont réuni pour ce projet des oeuvres qui sont autant de réflexions d’artistes contemporains face à l’exclusion de l’Autre. « C’est une exposition pour agiter les consciences. » Loin des chiffres et des images véhiculés par nos médias, loin des clichés et des certitudes, c’est ici par une approche sensible que le sujet du vivre ensemble et de l’attention à l’autre est abordé.
« De quelle manière les artistes explorent et donnent à voir l’urgence de la situation, la précarité et l’invisibilité, l’errance, le désenchantement et la répression ? Et plus généralement, les questions du départ et des circulations, du difficile enracinement mais aussi de la main tendue, du rêve et du désir d’ailleurs ? »
Enrique Ramirez, La Casa, 2013. Vidéo couleur, son, verre gravé,cadre en bois. Collection MNHI. ©Adagp, Paris, 2018
Les philosophes Fabienne Brugère et Guillaume le Blanc ont été invités à collaborer à l’exposition en ponctuant de leurs écrits les chapitres de l’exposition.
« On ne naît pas étranger, on le devient. Si l’art a souvent magnifié le noble étranger tel Ulysse, il reste que les migrations contemporaines sont le plus souvent celles de sujets maudits, sans cesse renvoyés aux pièges tendus par les États-nations dominants. Les obsessions sécuritaires créent les hallucinations de « l’étrange étranger » qui ne peut être des nôtres car il a été rendu différent. La différence confortée par les peurs engendre les terreurs et les guerres. Il semble bien que l’étranger soit désormais le mot dans lequel loger toutes les figures de la dangerosité.
L’espace qu’il remplit est l’espace de l’hostilité, une lande indéfinie, une entrée-sortie sans avenir, un dedans-dehors permanent. Être hospitalier n’est-ce pas pourtant montrer à quelqu’un qu’il est persona grata ? La bienvenue est le contraire d’une malvenue. L’expression est en usage chez les diplomates, elle signifie qu’un agent diplomatique a obtenu l’agrément de son propre État ou d’un État-tiers qui l’accrédite car il est désirable. Par contraste, persona non grata signifie être fait indésirable, ne plus avoir les moindres faveurs de quelque État que ce soit. Et si la diplomatie disait tout haut ce que signifie la langue grise de l’inhospitalité ?
Il se pourrait que les campements contemporains, les jungles solidifiées ne soient que l’autre nom de persona non grata. La pulsion de murs, aujourd’hui, semble totale. Un archipel carcéral se dessine, se greffe sur les paysages de lande. Combien de vies oubliées dans des habitations précaires, combien de vies désarrimées du monde commun ? »
"Xie Lei, Me and I, 2015. Huile sur toile, 186x146cm. Collection de l’artiste – photo © Courtesy de l’artiste
À visiter en ligne, le site commun des deux musées qui présentent l’exposition et la programmation culturelle, ainsi que de nombreux podcasts accessibles sur l’onglet « Ressources » en bas de page :
Hommes & migrations. Persona grata
Coordonné par Catherine Wihtol de Wenden, politologue, directrice de recherche au Cnrs (Ceri)
Revue trimestrielle du Musée National de l’Histoire de l’Immigration – oct. -déc. 2018, n° 1323
200 pages – 15 €